mardi 22 juillet 2008

Les xénophobes me sont étrangers



Le gouvernement japonais a provoqué la colère de la Corée en décidant de mentionner dans les programmes scolaires nippons sa revendication territoriale sur les Rochers de Liancourt (Takeshima en japonais), un groupe d'îlots de 0,2km2 que les Coréens considèrent comme partie intégrante de leur territoire. Au-delà de la querelle juridique, difficile à trancher pour un non-spécialiste (chaque partie met en avant une possession historique ancienne et des décisions contradictoires lors de la décolonisation de la Corée, soumise au Japon de 1905 à 1945), ce qui frappe est la différence d'approche entre les deux pays.

Le Japon a jugé opportun, à un moment où le lien entre Corée et Etats-Unis est affaibli par une querelle sur l'importation de viande bovine, de pousser un pion sur l'échiquier régional. Mais c'est là affaire de diplomates, car la population japonaise ne porte aucun intérêt au débat: pour ma part, bien que côtoyant le Japon de près depuis 20 ans, j'ignorais l'existence de ces rochers avant de venir vivre en Corée. Le gouvernement japonais a donc pu réaffirmer sa position, tout en restant très mesuré: demande d'un arbitrage par la Cour Internationale de Justice, et tolérance, y compris dans les manuels scolaires, d'opinions relativisant les droits du Japon sur les îlots. Au final, le Japon apparaît ainsi à la communauté internationale comme un acteur mûr et rationnel en Asie. C'était sans doute le but recherché.

La Corée considère la possession de Dokdo (nom coréen de ces îles) comme un point d'honneur national, et la décision du Japon a provoqué non seulement des manifestations violentes devant l'ambassade du Japon à Séoul, mais aussi un déluge d'articles et de prises de position sans nuance dans les médias coréens. Si quelques intervenants détaillent les raisons du bon droit coréen, nombre d'interventions sont à l'image d'une publicité diffusée en boucle sur la chaîne TV internationale coréenne Arirang : "accepteriez-vous que l'on enseigne à vos enfants le mensonge et le vol ? C'est pourtant ce que le Japon fait en niant la souveraineté de la Corée sur Dokdo". Si on peut comprendre les réactions épidermiques d'une population coréenne encore marquée par la colonisation, face à un Japon pratiquant peu la repentance, il est plus difficile de dédouaner médias et dirigeants qui, en versant de l'huile sur le feu, alimentent les vieilles rancœurs sans faire progresser leur cause. Au contraire.

Illustration: Dokdo par Lee Jong-Sang (1977)

Aucun commentaire: